L'Union européenne vise à promouvoir les activités économiques durables et respectueuses de l'environnement en guidant les investisseurs dans cette direction. Instaurée en 2020 et enrichie en février 2022, la taxonomie européenne est un système de classification qui identifie les activités économiques ayant un impact positif sur l'environnement. Son principal objectif est d'encourager les investissements vers des activités "vertes", contribuant ainsi à atteindre la neutralité carbone à l’échelle européenne d'ici 2050. Cette réglementation classe les activités selon leurs niveaux d'émissions de CO2e et prend en compte la taille des entreprises pour une application adaptée.
Mais qu'est-ce que la taxonomie exactement ? Quelles en sont les implications et quelles entreprises sont concernées ? Découvrez les réponses ici.
Taxonomie européenne : définition
Adopté par l'Union européenne en 2020 et initialement présenté en 2018 dans le cadre du plan d'action pour une finance durable, le Règlement Taxonomie vise à faire de l’Europe le premier continent à atteindre la neutralité carbone d'ici 2050, conformément au Pacte vert européen.
La taxonomie verte est une classification des activités économiques basée sur leur durabilité environnementale. Le "Technical Expert Group" (TEG), mandaté par la Commission européenne, a défini les critères pour identifier les activités contribuant substantiellement à l'atténuation et à l'adaptation au changement climatique.
Elle permet l’évaluation de la durabilité de 107 activités économiques, représentant plus de 93 % des émissions de gaz à effet de serre (GES) de l’UE, et englobe trois catégories d'activités :
- Activités directement durables : celles qui contribuent à la réduction des émissions de CO2, à la prévention et au contrôle de la pollution, et à la préservation de la biodiversité.
- Activités habilitantes : celles qui facilitent le développement d'autres entreprises durables et leur contribution positive à l'environnement.
- Activités transitoires : celles qui réduisent l'impact environnemental dans des secteurs où les alternatives durables ne sont pas encore disponibles.
💡 En bref : la principale mission de la taxonomie est de guider les investissements vers les activités les plus respectueuses de l'environnement, créant ainsi un écosystème de finance durable. Elle impose aux entreprises de démontrer la durabilité de leurs activités, orientant ainsi les investissements financiers européens vers des activités qui respectent l'environnement.
Ambition
Voici les aspirations de la taxonomie européenne :
- Encourager les investissements durables : en fournissant une définition claire de ce qui constitue une activité durable, la taxonomie vise à encourager les investissements dans des secteurs qui soutiennent la transition vers une économie verte.
- Assurer la transparence : elle améliore la transparence pour les investisseurs en fournissant des critères uniformes pour évaluer la durabilité des investissements.
- Lutter contre le greenwashing : en établissant des standards clairs, elle aide à prévenir le greenwashing, où des entreprises prétendent être plus durables qu'elles ne le sont réellement.
- Contribuer aux objectifs climatiques et réorienter les flux financiers : elle soutient les objectifs climatiques de l'UE, notamment la réduction des émissions de gaz à effet de serre de 55% d'ici 2030 et la neutralité carbone d'ici 2050.
Elle s’accompagne d’autres réglementations parmi lesquelles nous retrouvons la NFRD, remplacée à partir du 1er janvier 2024 par la CSRD, pour les reportings extra-financiers des entreprises, et la SFDR qui s’adresse aux acteurs financiers afin d’apporter davantage de transparence aux mécanismes d’investissement.
Objectifs
Pour qu'une activité soit qualifiée de "verte" ou "durable" selon la taxonomie européenne, elle doit contribuer de manière substantielle à un ou plusieurs des six objectifs environnementaux suivants :
- Atténuation du changement climatique : réduire ou prévenir les émissions de gaz à effet de serre.
- Adaptation au changement climatique : accroître la résilience face aux impacts climatiques.
- Utilisation durable et protection des ressources aquatiques et marines : assurer une gestion responsable et durable des ressources en eau.
- Transition vers une économie circulaire : promouvoir la réutilisation, le recyclage et la réduction des déchets.
- Contrôle de la pollution : réduire les polluants et les émissions nocives.
- Protection et restauration de la biodiversité et des écosystèmes : préserver et restaurer les habitats naturels et les espèces.
Mise en œuvre et impact
La taxonomie verte s'adresse actuellement à environ 11 700 entreprises. Avec l'entrée en vigueur de la nouvelle directive sur la publication d'informations en matière de durabilité par les entreprises (CSRD) en 2024, ce nombre sera progressivement étendu à 50 000 organisations, concernant l'ensemble des grandes entreprises et les PME côtées en bourse.
. Ces entreprises doivent effectuer un reporting annuel de leurs activités durables, soit dans leur déclaration non financière, soit dans un rapport distinct jusqu'en 2024, puis dans le rapport de gestion à partir de 2025.
La taxonomie verte concerne divers acteurs économiques, chacun devant se conformer à des obligations précises en matière de transparence et de reporting sur leurs activités durables.
- Les entreprises tenues de publier des informations sur la durabilité de leurs activités : elles doivent indiquer la proportion de leur chiffre d'affaires, de leurs investissements et de leurs dépenses liés à des activités durables. Les entreprises de plus de 500 salariés sont déjà tenues de rendre des comptes sur leur performance environnementale, incluant la publication de la Déclaration de Performance Extra-Financière (DPEF) et, à partir de 2023, un Rapport de Durabilité conformément à la Directive CSRD.
- Les États membres : ceux-ci mettent en place des mesures publiques, des normes et des labels pour les produits financiers verts, tels que les obligations vertes ("green bonds").
- Les acteurs financiers (banques, institutions de supervision financière, compagnies d'assurances, et gestionnaires de fonds d'investissement) qui ont soumis des règles de transparence sur leurs investissements. Ils doivent utiliser les informations fournies par la taxonomie pour évaluer et comparer les portefeuilles d'investissement. Cela aide à identifier la part des activités d'une entreprise qui contribue à des objectifs durables, facilitant une meilleure allocation des capitaux vers des projets respectueux de l'environnement.
💡 Le saviez-vous ? La taxonomie verte ne se limite pas aux grandes entreprises et aux acteurs financiers, mais impacte aussi l'ensemble de la chaîne de valeur, incluant fournisseurs, partenaires et autres parties prenantes. Cette approche globale vise à améliorer la transparence, réduire le greenwashing et encourager les investissements dans des activités réellement durables, contribuant ainsi à la transition vers une économie bas-carbone.
Le calendrier d'application
- 2022 : les entreprises européennes de plus de 500 salariés doivent publier les analyses d’éligibilité et des Indicateurs Clés de Performance (ICPs) pour l'exercice 2021, concernant les deux premiers objectifs de la taxonomie.
- 2023 : les mêmes entreprises doivent publier les analyses d’éligibilité, d’alignement et les ICPs pour l'exercice 2022, toujours en lien avec les deux premiers objectifs de la taxonomie.
- 2024 : publication des analyses d’éligibilité, d’alignement et des ICPs pour l'exercice 2023, couvrant les deux premiers objectifs de la taxonomie.
- 2025 : les entreprises doivent publier les analyses d’éligibilité, d’alignement et les ICPs pour l'exercice 2024, englobant l'ensemble des objectifs de la taxonomie.
- 2026 : les grandes entreprises doivent publier les analyses d’éligibilité, d’alignement et les ICPs pour l'exercice 2025, si elles répondent à au moins deux des critères suivants : 40 millions d'euros de chiffre d'affaires, 20 millions d'euros de bilan, ou 250 salariés ou plus.
- 2027 : les PME cotées en bourse doivent publier les analyses d’éligibilité, d’alignement et les ICPs pour l'exercice 2026.
- 2028 : les entreprises non européennes qui génèrent plus de 150 millions d'euros de chiffre d'affaires net dans l'UE via une filiale ou une succursale doivent publier les analyses d’éligibilité, d’alignement et les ICPs pour l'exercice 2027.
Quel avenir pour la taxonomie européenne ?
La taxonomie européenne est appelée à évoluer pour refléter les avancées technologiques et l'émergence de nouvelles activités. Bien que cartographier toutes les activités économiques soit un défi de longue haleine, cela visera à établir un outil de classification cohérent pour tous les pays de l'UE.
La Commission européenne envisage également des ajustements réguliers des critères d'examen techniques (CET) pour intégrer les progrès technologiques et économiques.
Intégration du gaz et du nucléaire dans la taxonomie verte
Depuis le 1er janvier 2023, la taxonomie verte inclut le gaz et le nucléaire parmi les sources d'électricité considérées comme durables, sous certaines conditions strictes. Pour les projets de construction de nouvelles installations nucléaires, la Commission européenne exige plusieurs garanties, notamment :
- Gestion des déchets nucléaires : les projets doivent prévoir des solutions adéquates pour le traitement des déchets et le démantèlement futur des installations.
- Permis de construire : un permis doit être obtenu avant 2045 pour toute nouvelle construction nucléaire.
En outre, pour les réacteurs nucléaires en service, les travaux visant à prolonger leur durée de vie doivent être autorisés avant 2040.
Vers une taxonomie brune ?
La Plateforme européenne sur la finance durable propose d'étendre la taxonomie avec une plus grande précision en créant une taxonomie brune. La taxonomie brune identifierait les activités les plus nuisibles, permettant ainsi de réorienter encore davantage d’investissements vers des activités plus durables.